La collection Narration

Quelques règles de bonne conduite

Procéder de la nécessité

Pour revenir sur la diversité des documents que nous venons d’entrapercevoir, il est important de comprendre que leur utilisation par l’auteur doit procéder du besoin, jamais de l’obligation. Ne vous sentez jamais obligé de vous en servir sous prétexte que d’autres le font ou conseillent de le faire. Il n’y a rien de plus idiot que de rédiger un document sans en comprendre ou ressentir l’utilité, le besoin.

Bien entendu, ce besoin est comme le reste : il se cultive. La plupart des apprentis-auteurs pensent n’avoir besoin de rien d’autre que leur imagination pour parvenir à concevoir leur chef-d’œuvre. Mais plus l’expérience se forge et plus le besoin de ces divers documents s’impose à l’auteur.

Le plus souvent, ce besoin dont je parle découle d’une nécessité d’y voir plus clair — donc de clarifier —, de se sortir du foisonnement d’entrelacs narratifs, de personnages nombreux, de situations aussi hétéroclites que variées, pour renforcer l’histoire ou régler un problème quelconque. C’est souvent dans ce cas que revenir en arrière — prendre du recul —, voir l’histoire de plus haut, de plus loin, diviser pour mieux régner, peut se révéler salvateur.

Prévenir vaut mieux que guérir

Chacun sait qu’il vaut toujours mieux prévenir que guérir. On retrouve ce principe dans le fait de toujours procéder du général au particulier.

Car l’expérience de l’écriture — et de la création en général — enseigne qu’un problème qui se pose dans une échelle inférieure — le synopsis par exemple — va fatalement poser des problèmes encore plus grands aux échelles supérieures — le traitement, le scénario.

Aussi, l’auteur expérimenté va-t-il se servir de ces documents pour procéder du général au particulier en s’assurant que chaque échelle de l’histoire est valide, comme nous en avons parlé à propos du bon à toutes les échelles.

Une approche intelligente

Pour bien fixer les choses, voyons quelques principes à respecter lorsque l’on aborde ces documents :

L’histoire doit être intéressante à toutes les échelles
Vue de loin — le pitch, le résumé court — comme vue de près — le scénario, le manuscrit —, ainsi qu’à toutes les tailles intermédiaires, l’histoire doit être intéressante. Ne pas reporter l’intérêt de l’histoire à l’échelle suivante en vous disant “là, mon histoire n’est pas très intéressante, mais l’intérêt viendra quand j’aborderai le traitement” ou alors “oui, mon intrigue est faible, mais c’est dans le détail des dialogues que je vais être fort”. Vous seriez perpétuellement en train de courir après votre histoire et, un beau jour essoufflé, vous abandonneriez la course en découvrant que, décidément, “tout se tient” et que la plus belle peau sur une forme immonde fera toujours fuir le plus curieux des spectateurs ou des lecteurs.
Toujours travailler ces documents avec le plus grand soin
Ne pas s’en débarrasser pour avoir la conscience tranquille, parce que tel ou tel cours de dramaturgie le mentionne ou que telle ou telle production vous le demande. “Les travailler avec soin”, cela signifie :
  • les rédiger dans un français simple et correct,
  • toujours s'efforcer de faire ressortir : l'originalité du concept, l'intérêt de l'histoire, l'émotion qui peut en découler,
  • voir ces documents comme des aides plutôt que comme des contraintes,
  • s'efforcer de ne pas faire mentir ces documents. Combien de fois un résumé ne correspond-il que vaguement à l'histoire que raconte le scénario ? Combien de fois des notes d'intention soulèvent des problématiques invisibles dans la continuité dialoguée ? Cela ne devrait jamais arriver car cela prouve malheureusement au lecteur que l'auteur lui-même ne connaît pas l'histoire qu'il est en train d'essayer de nous raconter.

En respectant ces quelques lignes de conduite, chaque auteur pourra tirer le plus grand profit des documents que nous allons aborder dans un instant plus en détail.